Malfaçons sur chantier : responsabilités partagées pour une collaboration réussie
Un chantier de construction ou de rénovation peut souvent réserver des mauvaises surprises comme une toiture qui fuit, une fenêtre qui ne ferme pas correctement, ou des problèmes de plomberie. Ces malfaçons, aussi appelées "désordres", peuvent survenir pendant ou après les travaux.
En général, c’est à l’entrepreneur de les réparer. Cependant, le client a aussi une part de responsabilité. Il doit vérifier certains aspects et jouer un rôle clé dans le bon déroulement des travaux.
Découvrez dans cet article comment éviter et gérer les malfaçons.
Malfaçon : les responsabilités de l’entrepreneur
La définition de la malfaçon est la suivante : il s’agit d’un défaut dans un ouvrage en raison d’une mauvaise exécution des travaux ou de défauts dans leur réalisation. Les causes de désordres sont en premier lieu recherchées dans la conduite des travaux par l’entrepreneur du BTP.
L’entrepreneur est tenu de respecter certaines normes
Le contrat passé avec l’entreprise comporte souvent des informations comme :
- les plans et les devis descriptifs des travaux ;
- les matériaux utilisés ;
- la date de commencement et de fin des travaux ;
- les pénalités éventuelles ;
- etc.
L’entrepreneur a une obligation de résultat s’agissant du bon accomplissement des travaux. Un écart entre le devis et/ou le contrat et le chantier livré est donc susceptible d’entraîner la mise en cause de sa responsabilité.
Il existe par ailleurs un corpus de normes générales et techniques s’appliquant au secteur du BTP. Elles sont conçues pour assurer la sécurité et la qualité des bâtiments.
En France, les documents techniques unifiés (DTU) sont produits par le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). En Suisse, les normes de la construction sont coordonnées par la Société suisse des ingénieurs et des architectes (SIA). En Belgique, les normes sont publiées par le Bureau de Normalisation (CEN).
Il existe également en France des obligations propres aux marchés publics à travers les cahiers des clauses administratives et techniques.
Réparation des malfaçons : les obligations de l’artisan du BTP après la livraison du chantier
Les garanties du client en France
En cas de constatation de malfaçons après la levée des réserves et la livraison des travaux, l’entreprise est en principe tenue de procéder aux réparations. Il existe 4 types de garanties :
- la garantie de parfait achèvement (article 1792-6 du Code civil) concerne les malfaçons qui apparaissent dans l’année qui suit la réception des travaux ;
- la garantie biennale ou de bon fonctionnement (article 1792-3 du Code civil) couvre pendant 2 ans à compter de la réception les désordres constatés sur les équipements dissociables de l’ouvrage (chaudière, plomberie, interphone, climatiseur, etc.) ;
- la garantie décennale de 10 ans (article 1792-4-1 du Code civil) concerne les désordres compromettant la solidité de l’ouvrage ou affectant des éléments d’équipement faisant corps à l’ouvrage.
- la responsabilité contractuelle de droit commun peut être mise en œuvre devant une juridiction civile avant réception et après réception pour les malfaçons ne relevant pas de la garantie décennale.
Bon à savoir :
Une assurance dommages-ouvrage doit être souscrite par l’acquéreur. Elle prend effet dès la réception du chantier et expire dans le même délai que la garantie décennale. Si l’entreprise ne réalise pas les réparations malgré une mise en demeure, l’assureur propose au client une indemnité.
Les garanties du client en Belgique
La loi Breyne du 9 juillet 1971 fixe les droits et obligations des acteurs de la construction. Elle prévoit notamment des dispositifs de résolution des litiges de façon amiable et crée des garanties au profit des clients. La réception des travaux s’effectue en deux phases (réception provisoire et réception définitive au moins un an après la réception provisoire). L’entrepreneur est responsable pendant 10 ans des défauts graves affectant la solidité, la stabilité ou l’étanchéité de l’habitation.
Les garanties du client en Suisse
La réglementation prévoit un délai de garantie de 2 ans pour les défauts apparents et de 5 ans pour les défauts cachés. En cas de vices frauduleusement dissimulés par l’entreprise, le délai est de 10 ans.
Malfaçons sur travaux : les responsabilités du client
Un litige pour travaux mal faits peut conduire à une action contentieuse. Pour éviter d’en arriver à ce stade, il existe plusieurs bonnes pratiques à suivre.
Le choix du professionnel du bâtiment
Il est conseillé de suivre certaines règles au moment de choisir son artisan :
- Ne pas contracter avec une entreprise qui pratique le travail dissimulé (« au noir »). Ces artisans n’apportent aucune garantie et cette situation peut être très préjudiciable au client.
- Signer un devis régulier avant d’effectuer tout versement.
- Choisir une entreprise qui jouit d’une bonne réputation et d’une bonne santé financière.
- Vérifier que l’artisan dispose des certifications obligatoires. Par exemple, en France, le label reconnu garant de l’environnement (RGE) dans le cadre de travaux de rénovation énergétique est un gage de qualité. De plus, cette condition doit être remplie pour prétendre à certaines aides financières.
- Ne travailler qu’avec des artisans assurés pour les travaux à réaliser et vérifier la validité des assurances à la date d’ouverture du chantier.
- Vérifier que les conditions particulières de l’assurance obligatoire correspondent au chantier concerné. Par exemple, un couvreur et un maçon sont assurés dans deux domaines d’activité différents.
- Ne pas s’acquitter de l’intégralité des travaux avant leur livraison et avant d’avoir vérifié qu’ils répondent aux attentes.
Éviter la survenance de malfaçons et tenter de régler à l’amiable les litiges
Pour éviter la survenance de malfaçons en cours de chantier, le client doit pratiquer une veille active. Il doit en particulier surveiller régulièrement l’état d’avancement des travaux. Par exemple, si l’entreprise accumule du retard, le client devrait provoquer une réunion avec son entrepreneur au plus vite. Il pourra ainsi lui être demandé de communiquer un calendrier mis à jour des travaux fixant de manière précise la durée restante.
Bon à savoir :
Une démarche amiable doit être privilégiée dans un premier temps. Il en va de l’intérêt du client. Notamment, si un contentieux provoque la liquidation de l’entreprise, le client ne pourra plus lui demander de réparer les malfaçons de son bien immobilier.
En cas d’échec de la première tentative de conciliation et avant d’engager une procédure, il est essentiel de mettre par écrit les échanges (envoi d’une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception).
Par ailleurs, la communication entre le client et l’artisan doit être fluide. Toute information utile doit être fournie à l’entreprise au plus tôt. Le client ne doit pas non plus hésiter à poser des questions et à solliciter l’artisan dès l’apparition d’un risque de malfaçon.
Si l’entrepreneur pose des questions en cas de modification des plans ou des spécifications, le client devrait y répondre rapidement.
En cas de contentieux, un défaut de surveillance ou de communication du fait du maître d’ouvrage peut être défavorablement apprécié par une juridiction.
La constatation d’une malfaçon sur travaux
Le client doit être en mesure de prouver la malfaçon. Pour ce faire, il est nécessaire de se constituer une documentation complète :
- photos claires et détaillées dès l’apparition de la malfaçon ;
- mention de la date de constatation de la malfaçon ;
- recours éventuel à un huissier de justice pour dresser un constat ;
- conservation de tous les échanges écrits avec l’entrepreneur.
Il appartient aussi au client de signaler toute malfaçon et de formuler des réserves lors de la réception de l’ouvrage. En effet, si des éléments visibles (« apparents ») ne sont pas inscrits sur le procès-verbal de réception, le client ne pourra pas exiger la réalisation de travaux de réparation des malfaçons ultérieurement.
En France, en cas de formulation de réserves, une partie du prix (5 %) peut être consignée jusqu’à la réparation des désordres.
Il existe un certain nombre de points à vérifier avant de signer le PV. L’acquéreur peut notamment constituer une check-list détaillée pour ne rien oublier. Il peut aussi se faire assister d’un professionnel du bâtiment comme un architecte à cette étape.
À retenir
En cas de malfaçon constatée en cours de chantier ou après la réception des travaux, les entrepreneurs sont tenus de réparer les désordres. Selon les pays, le client dispose d’un laps de temps déterminé pour se manifester. Toutefois, l’acquéreur ne peut s’exonérer de toute responsabilité. Il doit en effet être vigilant dans le choix du donneur d’ordre, faciliter la bonne exécution des travaux et décrire précisément les malfaçons constatées. Au final, il appartient à chacun d’instaurer un climat de confiance mutuelle et favoriser les démarches à l’amiable pour résoudre efficacement la plupart des litiges.
Malfaçon sur chantier : foire aux questions
La responsabilité des sous-traitants peut-elle être engagée en cas de malfaçon ?
Seule l’entreprise principale est responsable vis-à-vis du client, non ses sous-traitants. Toutefois, les sous-traitants ont une obligation de résultat pour la partie du chantier qui leur incombe. L’entreprise principale peut donc se retourner contre ses sous-traitants si la malfaçon leur est imputable.
Travaux en copropriété : comment gérer les malfaçons ?
Dans cette situation, il appartient au syndic de copropriété de prendre toutes les mesures pour détecter au plus vite les malfaçons. Il est possible que la responsabilité du syndic soit mise en cause, par exemple en cas d’accident lié à un vice caché. Les garanties légales dont il bénéficie sont les mêmes que celles des acquéreurs individuels.