Comment gérer l’inflation des coûts matériaux en tant qu’entrepreneur BTP ?
Reprise économique après la pandémie du COVID 19, guerre en Ukraine, augmentation des prix de l’énergie : le secteur du bâtiment et des travaux publics doit faire face depuis 2021 à une inflation en France des matériaux de construction.
Si l’évolution des prix semble plus favorable en 2024, les professionnels du bâtiment vont devoir vivre avec un niveau élevé de prix de façon durable.
Face à cette situation, plusieurs stratégies peuvent être mises en place. Négociation des contrats, adaptation de la politique d’approvisionnement, amélioration du recouvrement des créances, Vertuoza fait le point sur vos différents leviers d’action.
L’inflation des matériaux de construction : les tendances depuis 2021
Une inflation liée à la pénurie de matériaux
Alors que pendant la crise du COVID la production de matériaux de construction a marqué un coût d'arrêt, 2021 a vu une accélération de l’activité économique. La demande a ainsi été particulièrement forte aux États-Unis et en Asie puis en Europe. Or, la production de matériaux n’a repris que lentement avec un allongement des délais de livraison et l’apparition de pénuries.
Cette situation a entraîné une augmentation des matériaux de construction sans précédent. Ainsi, d’après la CAPEB (Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment), les prix ont connu une envolée au premier semestre 2021 dans tous les corps d’état :
- entreprises de maçonnerie : béton (+ 61 %), bois (+ 46 %), plaques de plâtre (+ 32 %) ;
- couvreurs-plombiers-chauffagistes : cuivre (+ 77 %), zinc (+ 75 %), bois (+ 70 %) ;
- entreprises d’aménagement-décoration-plâtrerie : PVC (+ 73 %), peinture (+ 55 %) ;
- etc.
De nouveaux facteurs inflationnistes en 2022
Peu de temps après la pandémie, les relations commerciales avec la Russie ont été suspendues en raison de la guerre en Ukraine. Or, la Russie est un grand producteur de matières premières comme l’aluminium ou l’acier. De plus, le conflit est à l’origine d’une augmentation du prix du pétrole et du gaz avec des répercussions sur le coût des transports.
À ce contexte international est venu s’ajouter une conjoncture française liée à la réglementation environnementale RE 2020 visant à améliorer la performance énergétique des bâtiments. Couplée avec le dispositif d’aides comme MaPrimRénov’, les chantiers de rénovation ont connu une forte augmentation de la demande.
Vers un ralentissement des prix en 2024 ?
À compter de 2023, le secteur de la construction a connu une réduction des volumes de production avec une contraction des ventes, du nombre des permis de construire et des investissements résidentiels des particuliers. De plus, certains dispositifs d’aide connaissent des baisses : suppression du dispositif Pinel fin 2024, exclusion de la maison individuelle et de certains territoires du PTZ…
D’après les économistes de l’Insee, le prix moyen des matériaux connaît désormais une orientation à la baisse, même si le niveau de prix restera loin de celui précédant la crise du COVID 19.
L’impact de l’augmentation des matériaux de construction sur l’activité des professionnels du bâtiment
Les acteurs de la construction ont eu des difficultés pour respecter les délais prévus au contrat. L’approvisionnement étant devenu aléatoire, certains chantiers ont dû être retardés, voire interrompus. D’autres professionnels sont obligés de proposer aux clients d’autres matériaux que ceux initialement prévus au contrat.
Face au prix des matériaux en hausse, certains acteurs du BTP ont augmenté leurs tarifs pour limiter la perte de marge. Ceci s’explique par le poids des matériaux dans le prix d’un chantier (de 30 % à 40 %). Outre l’augmentation des tarifs, les artisans du BTP ont aussi limité leurs embauches, une tendance accentuée par l’augmentation du SMIC.
Se protéger de l’inflation des matériaux : adapter les devis et les contrats
Bon à savoir : Le gouvernement français a créé un observatoire du prix des matériaux en 2023 piloté par l’Insee. Son objectif est notamment d’aider les entreprises à établir leurs devis et de donner une meilleure visibilité sur le marché aux clients.
Diminuer la durée de validité des devis
Une durée plus courte de la validité des devis permet de se protéger contre les variations de prix des matériaux. Ainsi, certains entrepreneurs du bâtiment fixent désormais une validité d’une semaine. De façon générale, le délai ne dépasse pas un mois.
Un délai raccourci entre la validation du devis et le début de réalisation des travaux est un atout majeur. Vous êtes en mesure de commander vos matériaux rapidement, ce qui a pour effet de figer vos coûts.
Vous pouvez également adapter vos conditions générales de vente (CGV) de façon régulière en fonction du contexte économique, de la clientèle et des prestations proposées.
Prévoir une révision des prix dans les marchés de travaux
Dans un marché de travaux, introduire une clause de révision des prix permet à l’entrepreneur de se protéger contre une augmentation des matériaux. Depuis 2021, le gouvernement a imposé cette clause dans les marchés publics de travaux.
Ce dispositif est plus protecteur que l’actualisation des prix. Cette dernière, obligatoire dans les marchés de travaux, ne peut jouer qu’une seule fois et à certaines conditions (notamment un délai supérieur à 3 mois entre la fixation des prix et le commencement des travaux).
La clause de révision des prix est obligatoire, mais elle ne peut pas être introduite ou modifiée en cours d’exécution du marché. La révision est prévue selon 3 méthodes :
- application d’un indice de référence, comme les index BT/TP de l’Insee ;
- application d’une formule représentative de l’évolution des prix ;
- combinaison de ces 2 mécanismes.
Prévoir une clause d’imprévu
L’imprévision protège le titulaire du marché par le versement d’une indemnisation du client. Trois conditions doivent être respectées :
- survenue d’un événement qui n’était pas prévisible au moment de la signature du contrat ;
- l’événement est étranger à la volonté des signataires ;
- il entraîne un bouleversement de l’économie du contrat.
L’augmentation du prix des matériaux remplit les 2 premiers critères. Pour que le 3e soit validé, la jurisprudence établit que l’événement risque de conduire l’entreprise à la cessation de paiement. De plus, une tendance à la hausse des prix de matériaux connue depuis plusieurs mois n’est pas considérée comme un événement imprévisible.
Exemples de bonnes pratiques pour gérer l’augmentation des prix des matériaux de construction
L’augmentation du prix des matériaux incite les professionnels du bâtiment à la prudence ou à moderniser certaines de leurs pratiques
Optimiser les approvisionnements
Afin de mieux maîtriser l’augmentation des matériaux de construction, les professionnels peuvent :
- diversifier les sources d’approvisionnement ;
- mettre en concurrence les fournisseurs et négocier les conditions tarifaires, notamment en cas de grosse commande ;
- acheter au bon moment en cas d’anticipation d’une augmentation des prix (ce qui nécessite toutefois de disposer de la trésorerie et des capacités de stockage nécessaires) ;
- varier les types de matériaux utilisés en proposant aux clients des matériaux moins chers en fonction de la conjoncture.
Garantir l’encaissement des créances
Dans une période d’incertitude, il est important de s’assurer que le client est solvable avant d’accepter un chantier. Deux publics sont concernés :
- Les particuliers. N’hésitez pas à vous renseigner sur le mode de financement des travaux.
- Les professionnels. Veillez à consulter les comptes de l’entreprise s’ils sont disponibles afin de porter une appréciation sur sa solvabilité.
De plus, l’entreprise du BTP peut prévoir le versement d’acomptes ou d’avances forfaitaires. Cela lui permettra notamment d’acheter les matériaux nécessaires au chantier sans mobiliser sa trésorerie disponible ou avoir recours à un financement bancaire. C’est un plus dans un contexte d’augmentation des matériaux de construction.
Bon à savoir. Le client doit garantir à l’artisan le paiement des travaux quand ils excèdent 12 000 € HT. La garantie peut être le paiement direct par l’établissement de crédit ou une caution solidaire.
Il s’agit également de bien surveiller les délais de paiement. Pour les particuliers, il convient de le mentionner dans le devis et/ou les CGV. Il peut être demandé un paiement à réception de la facture (sous 8 jours). Pour les professionnels, le maximum est de 60 jours date de facture ou de 45 jours fin de mois. En cas de retard, l’application de pénalités de retard peut aussi être prévue.
Gérer le taux d’inflation des coûts matériaux : tout ce que vous devez savoir
Les nouvelles technologies peuvent-elles m’aider à maîtriser mes coûts de construction ?
Il existe en effet des outils qui peuvent être utiles dans un contexte d’inflation des matériaux de construction :
- La modélisation des informations du bâtiment (ou BIM – Building Information Modeling) est un outil qui permet de modéliser les bâtiments en 3 D. L’outil permet en particulier de prévoir la quantité exacte de matériaux nécessaires et d’estimer précisément le budget du projet de construction.
- Les logiciels de suivi des chantiers comme Vertuoza favorisent la maîtrise des opérations et du budget d’un chantier. Avec un meilleur suivi, vous fluidifiez l’exécution du chantier et anticipez les difficultés de toute nature.
Pourquoi utiliser une bibliothèque de prix travaux ?
La bibliothèque de prix travaux, ou base de prix travaux, est une base de données de référence pour le tarif des matériaux, des fournitures et de la main-d’œuvre dans le secteur du BTP. Il s’agit d’un outil mis à jour régulièrement qui vous aide à chiffrer précisément le montant des travaux. Vos devis sont ainsi calculés de manière fiable.