Comment gérer l’inflation des coûts matériaux en tant qu’entrepreneur en Belgique ?
Reprise économique après la pandémie du COVID 19, guerre en Ukraine, augmentation des prix de l’énergie : le secteur du bâtiment et des travaux publics doit faire face depuis 2021 à une inflation des matériaux de construction.
Si l’évolution des prix semble plus favorable en 2024, les professionnels du bâtiment vont devoir vivre avec un niveau élevé de prix de façon durable.
Face à cette situation, plusieurs stratégies peuvent être mises en place. Négociation des contrats, adaptation de la politique d’approvisionnement, amélioration du recouvrement des créances, Vertuoza fait le point sur vos différents leviers d’action.
L’inflation des matériaux de construction : les tendances depuis 2021
Une inflation liée à la pénurie de matériaux
En Belgique, le gouvernement a introduit en novembre 2020 l’indice I-2021 pour faciliter le suivi des prix du secteur de la construction. Ainsi, entre novembre 2020 et avril 2024, les évolutions de prix sont notables :
- métallurgie (+ 39,37 %) ;
- sciage et rabotage du bois (+ 38,92 %) ;
- fabrication de peintures, vernis et encres (+ 27,73 %) ;
- ciment (+ 83,05 %).
De nouveaux facteurs inflationnistes en 2022
Peu de temps après la pandémie, les relations commerciales avec la Russie ont été suspendues en raison de la guerre en Ukraine. Or, la Russie est un grand producteur de matières premières comme l’aluminium ou l’acier. De plus, le conflit est à l’origine d’une augmentation du prix du pétrole et du gaz avec des répercussions sur le coût des transports.
Un ralentissement des prix à partir de 2023
À compter de 2023, le secteur de la construction a connu une réduction des volumes de production avec une contraction des ventes, du nombre des permis de construire et des investissements résidentiels des particuliers.
D’après la fédération de la construction Embuild en 2023, il n’y a plus de fortes hausses des prix des matériaux de construction. Certains ont même tendance à diminuer. Il s’agit par exemple :
- de matériaux dont le prix se stabilise (brique, ciment, béton) ;
- de matériaux dont le prix baisse (plastique, acier, cuivre, aluminium, zinc).
D’après Embuild, cette évolution tient à la baisse des coûts de transport, du cours du dollar et de la demande en Chine. Toutefois, la fédération souligne que les prix restent 35 % plus élevés qu’en mars 2020.
L’impact de l’augmentation des matériaux de construction sur l’activité des professionnels du bâtiment
Les acteurs de la construction ont eu des difficultés pour respecter les délais prévus au contrat. L’approvisionnement étant devenu aléatoire, certains chantiers ont dû être retardés, voire interrompus. D’autres professionnels sont obligés de proposer aux clients d’autres matériaux que ceux initialement prévus au contrat.
Face au prix des matériaux en hausse, certains acteurs du bâtiment ont augmenté leurs prix pour limiter la perte de marge. Ceci s’explique par le poids des matériaux dans le prix d’un chantier (de 30 % à 40 %).
De plus, en raison de l’inflation et des taux d’intérêt, les Belges investissent moins dans la brique. Ainsi, le nombre des mises en chantiers de logements a diminué de près de 70 000 en 2023, une tendance qui devrait se poursuivre en 2024 (- 50 000 unités). Ceci entraîne aussi une baisse de la demande de matériaux comme le béton prêt à l’emploi (diminution prévue de 10 % en 2024).
Se protéger de l’inflation des matériaux : adapter les devis et les contrats
Diminuer la durée de validité des devis
Une durée plus courte de la validité des devis permet de se protéger contre les variations de prix des matériaux. Ainsi, certains entrepreneurs du bâtiment fixent désormais une validité d’une semaine. De façon générale, le délai ne dépasse pas un mois.
Un délai raccourci entre la validation du devis et le début de réalisation des travaux est un atout majeur. Vous êtes en mesure de commander vos matériaux rapidement, ce qui a pour effet de figer vos coûts.
Vous pouvez également adapter vos conditions générales de vente (CGV) de façon régulière en fonction du contexte économique, de la clientèle et des prestations proposées.
Prévoir une clause de révision des prix ou recourir à l’imprévision
Bon à savoir : la mention du prix dans un contrat ne se fait pas nécessairement en euros. Le prix doit être déterminable grâce à des critères objectifs. Ce principe permet les clauses de révision de prix en fonction du coût des matériaux et de la main-d’œuvre.
Il existe néanmoins des dispositions légales à respecter :
- une clause de révisions de prix ne peut être appliquée qu’à hauteur de 80 % maximum du prix final ;
- les paramètres utilisés doivent être conformes à des coûts réels (prix des matières premières, salaires, frais de transport, etc.) ;
- chaque paramètre ne s’applique qu’à la partie du coût qu’il représente ;
- la référence à un paramètre ou un indice général tel que l’indice des prix à la consommation n’est pas autorisée.
Bon à savoir. Les clauses de révision de prix ne sont valides que si le client en a eu connaissance avec la signature du contrat. L’acheteur est libre de refuser une clause de révision de prix, mais l’entreprise peut également s’opposer à ce refus. Dans une telle situation, mieux vaut rechercher une solution à l’amiable, le cas échéant avec le recours à un architecte.
Par ailleurs, les conditions des contrats conclus à compter du 1er janvier 2023 peuvent faire l’objet d’une renégociation en application de la théorie de l’imprévision. Cette dernière joue notamment en cas de circonstances imprévues et d’une augmentation significative des coûts. En cas d’échec de la renégociation, une des parties au contrat peut saisir la juridiction compétente.
Exemples de bonnes pratiques pour gérer l’augmentation des prix des matériaux de construction
L’augmentation du prix des matériaux incite les professionnels du bâtiment à la prudence ou à moderniser certaines de leurs pratiques.
Optimiser les approvisionnements
Afin de mieux maîtriser l’augmentation des matériaux de construction, les professionnels peuvent :
- diversifier les sources d’approvisionnement ;
- mettre en concurrence les fournisseurs et négocier les conditions tarifaires, notamment en cas de grosse commande ;
- acheter au bon moment en cas d’anticipation d’une augmentation des prix (ce qui nécessite toutefois de disposer de la trésorerie et des capacités de stockage nécessaires) ;
- varier les types de matériaux utilisés en proposant aux clients des matériaux moins chers en fonction de la conjoncture.
Garantir l’encaissement des créances
Dans une période d’incertitude, il est important de s’assurer que le client est solvable avant d’accepter un chantier. Deux publics sont concernés :
- Les particuliers. N’hésitez pas à vous renseigner sur le mode de financement des travaux.
- Les professionnels. Veillez à consulter les comptes de l’entreprise s’ils sont disponibles afin de porter une appréciation sur sa solvabilité.
De plus, la loi du 22 décembre 2023 a modifié le régime des avances dans le cadre des marchés publics. Auparavant, le versement d’avances était exceptionnel. Il devient désormais obligatoire pour l’État, les Régions, les Communautés, les pouvoirs publics locaux et les entités qu’ils financent et contrôlent. Ces autorités publiques sont tenues de verser une avance :
- en cas d’utilisation de la procédure négociée sans publication préalable (dont les marchés d’une valeur inférieure à 143 000 €) ;
- en cas d’utilisation d’une autre procédure à condition que l’entreprise du bâtiment soit une PME.
La réglementation prévoit des valeurs de référence et des pourcentages d’avance en fonction de la durée du marché et de la taille de l’entreprise notamment.
En outre, le Roi peut élaborer des modalités des avances spécifiques en cas de circonstances économiques exceptionnelles (mécanisme mis en œuvre en 2022 suite à la guerre en Ukraine).
Par ailleurs, l’entreprise doit également bien surveiller les délais de paiement de ses clients.
Gérer le taux d’inflation des coûts matériaux : tout ce que vous devez savoir
Les nouvelles technologies peuvent-elles m’aider à maîtriser mes coûts de construction ?
Il existe en effet des outils qui peuvent être utiles dans un contexte d’inflation des matériaux de construction :
- La modélisation des informations du bâtiment (ou BIM – Building Information Modeling) est un outil qui permet de modéliser les bâtiments en 3 D. L’outil permet en particulier de prévoir la quantité exacte de matériaux nécessaires et d’estimer précisément le budget du projet de construction.
- Les logiciels de suivi des chantiers comme Vertuoza favorisent la maîtrise des opérations et du budget d’un chantier. Avec un meilleur suivi, vous fluidifiez l’exécution du chantier et anticipez les difficultés de toute nature.
Pourquoi utiliser une bibliothèque de prix travaux ?
La bibliothèque de prix travaux, ou base de prix travaux, est une base de données de référence pour le tarif des matériaux, des fournitures et de la main-d’œuvre dans le secteur du BTP. Il s’agit d’un outil mis à jour régulièrement qui vous aide à chiffrer précisément le montant des travaux. Vos devis sont ainsi calculés de manière fiable.